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Boîte de Pandore ou pierre de Jade ?

La voie du Bodhisattva(*) ouvre la porte à un bonheur infini mais le bonheur n’ouvre aucune porte, il ne se suffit pas à lui-même. On ne peut regarder ce monde de souffrance avec béatitude. Le bonheur serait alors un enfermement volontaire, une boîte de pandore qu’on aurait refermé pour rester heureux. Le jour de leur mariage, on remit à Pandore une jarre dans laquelle se trouvaient tous les maux de l’humanité. On lui interdit de l’ouvrir. Elle ne respecta pas la condition et tous les maux s’évadèrent pour se répandre sur la Terre.

Après avoir refermée la boîte, Pandore peut toujours utiliser ses dons de séduction et de tromperie envers les hommes, mais pas pour elle-même. Elle ne peut plus plaire à elle-même car elle a un lourd secret. Le bonheur qu’elle essaime par sa beauté et sa douceur n’est plus pour elle. Il est extérieur. Pandore ne voit plus que les rides sur le coin de ses propres lèvres quand elle sourit. En ouvrant la boîte elle a perdu définitivement la sagesse et le chemin qui y conduit lui est inaccessible.

La sagesse fait naitre le bonheur à l’intérieur de soi. Il m’arrive des trucs pas marrants mais rien de ce qui m’arrive ne peut vraiment m’affecter, parce que j’accepte le contrat. C’est le contrat de la vie, le seul et unique moyen pour trouver le chemin.

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Le Bodhisattva accepte tout et n’importe quoi. La cause précède toujours l’effet. La sagesse permet de tout supporter. Tout et n’importe quoi sans sourciller quand il s’agit de soi. Quand le sage regarde les autres il sort du bonheur exactement au même moment où il ouvre la boîte. L’empathie ne peut s’exprimer que dans la souffrance.

Comment parler du bonheur à quelqu’un qui souffre dans sa chair ?

Comment parler de la lumière à un aveugle de naissance ?

Comment trouver la paix dans la folle agitation de nos pensées discursives ?

La roche contient la pierre de jade sans connaître la perfection de la pierre de jade, écrivait  Wanshi (vécu en Chine 1091-1157).

Tout est dit dans cette formule.

Prenez du recul par rapport à toutes choses. Regardez d’un peu plus haut. Avant chaque séquence vidéo le cadreur donne généralement un plan large, parfois en plongée. Ainsi il vous permet d’observer la scène de l’extérieur, de l’englober d’un regard analytique. Il peut y avoir plusieurs pôles qui sous-tendent l’action, pas seulement deux opposés mais quatre, six, huit… L’interdépendance des phénomènes est tellement vaste et imbriquée qu’on n’est bien incapable de comprendre la vraie cause et les réelles conséquences. Vous prenez l’avion et les contrôleurs aériens ont décidé de faire grève ce jour-là. C’est une cause apparente qui dérange. Tout le monde râle autour de vous, c’est la bousculade pour partir malgré tout. En prenant du recul vous pensez à votre karma. Prendre l’avion c’est effrayant, s’il ne part pas il ne faut ni s’en inquiéter, ni s’en réjouir ! S’il ne part pas le jour de votre départ programmé, c’est comme ça. Point. Vous avez choisi un mauvais jour. Au fond vous avez bien 50 % de responsabilité puisque votre choix s’est porté sur ce jour-là ! C’est le deal gagnant-gagnant.

Il faut croire en la pierre de Jade. Savoir qu’elle existe en vous, comprendre qu’elle est précieuse comme la vie qui vous traverse, et que vous ne pourrez jamais, jamais comprendre à quel point elle est parfaite.

La pratique désintéressée de zazen(*) est essentielle pour comprendre, accéder au sacré en toute innocence.

C’est comme cela que l’on quitte sa demeure pour devenir un véritable moine nous dit  Wanshi.

Quitter sa demeure c’est rester dans ce monde et accepter notre destinée comme la manifestation imparfaite de notre condition. Sans zazen et la méditation on ne peut connaître la pierre de Jade et percevoir son pouvoir bénéfique infini. C’est la vérité du Bouddha Sakyamuni, celui qui ouvre les yeux. Pratiquer zazen pour trouver la pierre de Jade, c’est plus qu’un but, c’est une vie consacrée, une sublime motivation qui englobe la misère du monde.

©daniel Bukō Hōten

(*) voir glossaire

Illustration : pounamu (tiki de jade pendentif maori : être mi-dieu, mi-homme représentant de lointains ancêtres mythiques) exposition  Musée du Quai Branly Paris (nov 2011).
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Nostalgie – le retour au pays

Le retour au pays c’est un moment de nostalgie à ne pas manquer même si, je me demande parfois pourquoi, on n’aime pas ça.  La tristesse, la nostalgie, le manque de ses proches qui réapparaissent pour mieux nous quitter encore, ça nous fait voir la mort, alors c’est indécent. Cousinades, embrassades on reste toujours « le fils de l’éboueur » dans son village natale comme le dit Baso (article Le coin de l’auteur) et on n’aime pas revoir des visages familiers 15 ans plus tard, on n’a pris des rides c’est indécent. Une petite fille est venue me faire une bise de la part de sa maman, il lui suffisait de trouver le plus vieux monsieur…Merci Karine, merci Cécile la petite américaine. Mon frère ressurgit à travers un dernier tableau que j’ai ramené dans mes bagages  pour débarrasser les greniers,IMG_1888

 et un petit brin d’accordéon que j’avais mis de côté, de Laurent Giani…un homme que l’on aurait aimer croiser.

La nostalgie il faut l’aimer car elle nous sauve de la morosité, de l’apathie et de la banalité quotidienne ; c’est un bol de chocolat chaud que l’on boit comme Corbillot, le vieux corbeau seul sur sa branche.

Dans un village  de provence deux couples de vieux qui se croisent dans une pharmacie, cet été. J’allais y chercher des mouchoirs en papier et des gouttes pour le nez … Après les bonjour vient la  longue liste des maladies et des médicaments qu’on est obligé de prendre, puis les inévitables réflexions C’est bientôt notre tour, héhéhé…c’est à nous d’y passer, un jour elle sera là… J’ai aussi eu envi d’éclater de rire mais d’un rire glacial, démoniaque. La décence c’est aussi se taire, taire nos peurs, nos inquiétudes pour faire passer autre chose que la banalité des convenances et des réflexions de circonstances. On n’est pas obligé de jouer cette comédie désabusée. La vie est belle à prendre au présent tel que l’on est, sans regret ni amertume. La nostalgie n’a pas forcément un goût amer. On peut la boire délicatement comme Corbillot, avec amour, respect,  et sans la moindre arrogance.

Et, comme nous le dit Laurent  Giani, la vie est plus belle quand on lui sourit !

©daniel Bukō Hōten